ITW de Mr Hardearly, I’m a Bluesman
ITW préparée et réalisée par Alain AJ-Blues – rédacteur en chef adjoint – Paris-Move
Photos: © Alain AJ-Blues
A l’âge de 15 ans, Mr Hardearly prend le chemin de l’école buissonnière, sa première guitare sur le dos, qu’il domptera à l’écoute de guitaristes mythiques comme Johnny Winter, Jimi Hendrix, Stevie Ray Vaughan et Jeff Beck. Il enregistre alors ses premières maquettes sur un 4 pistes.
Ce tout jeune Titi parisien découvre l’Angleterre au gré de séjours linguistiques et écume les rues de Londres et de Brighton à la recherche d’un vinyle de Clapton ou d’une pédale d’effets. Le sort en est jeté! Notre jeune homme deviendra un virtuose de la guitare et un ingénieur du son estimé. Mr Hardearly joue une musique imprégnée de British Blues marquée par l’esprit des grands maîtres du genre.
En 25 ans de carrière, Mr Hardearly a partagé de nombreuses scènes françaises et européennes avec de multiples artistes de renommée internationale tels ZZ Top, Status Quo, The Commitments, Georgia Sattelites, Van Wilks, Bernard Allison, et bien d’autres encore.
Avec 3 albums à son actif, ‘Still Alive & Well’ en 2009, ‘White Urban Blues’ en 2013, ‘X-Perienced’ en 2016, Mr Hardearly annonce la sortie d’un nouvel opus, un tournant dans sa carrière, reflet de 10 années de travail en son nom qui lui ont apporté une sensibilité bien personnelle qui le hisse aujourd’hui parmi les plus grands noms du blues français.
Le temps passe, inexorablement, et c’est un immense plaisir pour moi de retrouver Mr Hardearly…. et de nous retrouver comme si nous nous étions quittés hier.
Alain AJ-Blues: Eric Hardearly, je te remercie infiniment de nous accorder cette interview exclusive pour Paris-Move. Entrons d’emblée dans le vif du sujet, c’est à dire ce nouvel album ‘I’m a Bluesmam’ dont l’intitulé te correspond tout à fait, tant cette passion du Blues brûle en toi, et ce depuis de nombreuses années.
Mr Hardearly: Le plaisir de nos retrouvailles est entièrement partagé, et je vous remercie également tous les deux de m’avoir si gentiment invité pour réaliser cette interview en exclusivité pour Paris-Move. Je vais te dire, Alain, si j’ai intitulé cet album ‘I’m a Bluesman’, c’est un peu de ta faute!
Alain AJ-Blues: Comment ça, c’est un peu de ma faute?
Mr Hardearly: Souviens toi, quelques années auparavant, tu étais venu me faire des photos dans un studio aux portes de Paris, et lors de notre conversation je t’avais demandé si je jouais du Blues. Tu m’as répondu: “non Eric, tu es un Bluesman!”. Voilà, je m’en suis souvenu.
Alain AJ-Blues: Je suis surpris, et honoré d’avoir commis une telle faute (sourire)…
Mr Hardearly: Je voulais également, et je précise, non pas remettre quelques pendules à l’heure, mais prendre quelques exemples d’artistes comme Jimi Hendrix, Johnny Winter, S.R. Vaughan ou Gary Moore, car au début de leur carrière, on disait d’eux qu’ils faisaient du rock ou du blues/rock. Maintenant qu’ils ne sont plus de ce monde, ils sont tous reconnus comme étant de grands bluesmen. Donc je veux dire que ce que je fais avec le groupe, c’est du Blues et cela restera du Blues, même si nous ne sommes pas noirs, ni nés sur les rives du Mississipi.
Je joue du blues blanc, urbain, car je suis parisien, avec cette touche plus moderne, du Blues mis à jour, du Blues “deux points zéro” quelque part, pour reprendre l’expression, et cela sans prétention. Je veux réaffirmer, car en plus nous fêtons les 10 ans du groupe cette année, que nous sommes bien un groupe de Blues.
Alain AJ-Blues: Les 10 ans du groupe en tant que Mr Hardearly, et non pas depuis tes débuts, c’est important de le préciser, sinon il faudrait remonter le temps, c’est à dire d’environ 25 années.
Mr Hardearly: Même plus, je dirai même une trentaine d’années dans le Blues, car j’accompagnais d’autres artistes sur d’autres projets à l’époque.
Alain AJ-Blues: Ce nouvel album ‘I’m a Bluesman’ n’est pas encore disponible, il faudra attendre encore quelques temps pour se le procurer. Pour quand est prévue la sortie officielle?
Mr Hardearly: Il sera disponible en sortie nationale à la rentrée en septembre. Par contre, pour fêter les 10 ans du groupe, on voulait faire quelque chose de spécial et d’inhabituel, pour nos fans et les gens qui nous suivent. L’album est donc disponible à la vente, de manière anticipée, dès maintenant en ce mois de juin sur le site, ICI
Pour les 10 ans du groupe, nous proposons également à la vente sur le site, un bonus, un album ‘live’, tiré en collector à 200 exemplaires. Le prix de l’album ‘I’m a Bluesman’ est de 15 euros, tout comme celui de l’album ‘live’. Donc avant la sortie officielle de ‘I’m a Bluesman’, nous faisons un tarif préférentiel de 25 euros pour les 2 albums, ce que nous ne faisons pas habituellement. C’est en exclusivité pour nos fans et pour l’anniversaire du groupe, et uniquement sur le site!
Alain AJ-Blues: En septembre ne sortira dans les bacs de la FNAC et autres points de ventes uniquement l’album ‘I’m a Bluesman’, nous sommes bien d’accord, n’est-ce pas?
Mr Hardearly: Tout à fait, l’album live sera toujours en vente uniquement sur le site, jusqu’à épuisement des 200 exemplaires, mais il n’y aura plus de tarif préférentiel pour les deux.
Alain AJ-Blues: Cet album ‘live’, peux-tu en parler, tout de même? Nous sommes curieux d’en savoir plus.
Mr Hardearly: Nous avons enregistré ce ‘live’ durant un an, sur les routes, dans différents clubs et salles de concert. C’est un reflet de notre tournée, avec des titres des trois derniers albums ainsi que 2 titres du tout nouvel album, et également pas mal de reprises, car le public nous en demande, que vous pouvez d’ailleurs retrouver sur les 2 DVD que nous avons déjà fait. C’est un album collector pour les 10 ans du groupe.
Alain AJ-Blues: Revenons sur ‘I’m a Bluesman. Quels sont les thèmes des textes de tes compositions en anglais, sont-ils autobiographiques, nés de ton imagination, ou des regards portés sur le monde actuel qui nous entoure?
Mr Hardearly: Je dirais que c’est un peu de tout cela. J’aime bien les textes à tiroirs. Je t’explique… lorsque j’écris un texte, c’est une histoire qui peut être autobiographique ou non, ou bien une réflexion sur notre société, et j’aime que chacun puisse l’interpréter à sa façon et se retrouver dans mon écriture. La meilleure chose que l’on puisse me dire c’est, “Tiens, tu as écrit ce texte pour moi”, alors que non, pas du tout. L’important est que les personnes puissent s’identifier. Je prends un exemple, ce texte, ‘Un beau roman, une belle histoire’, écrit par Pierre Delanoë pour Michel Fugain. Tout le monde se reconnait dans cette chanson. L’important est que chacun y trouve son compte et puisse retrouver sa propre histoire, même si cette histoire est mienne. J’aime bien que cela parle à tout le monde et que ce soit le plus ouvert possible. Voilà, c’est ce que j’appelle des textes à tiroirs. Souvent je conjugue l’humour pour ceux qui savent le décrypter.
Alain AJ-Blues: Je te laisse le choix de certains titres de l’album, pour quelques explications de textes. Nous t’écoutons…
Mr Hardearly: Je prends par exemple ‘Hey where’s the money’. C’est une réflexion sur les relations faussées dans le milieu de la musique, qui doit être un partage entre les différents musiciens entre eux et avec le public. Mais souvent cela reste des relations très vénales, notamment dans ce métier, car même parfois entre artistes il est question de ‘gros sous’. Donc ce titre est une petite chronique ironique, et je remercie infiniment Fred Chapellier venu très gentiment et bénévolement, je tiens à le préciser, partager avec tout son talent deux fabuleux solos de guitare à mes côtés. Je parle d’un fait bien réel.
Ensuite ce titre ‘No fathers’s son’ me touche plus précisément, concernant les enfants de familles monoparentales, les relations entre parents et enfants d’une manière générale. Je laisse chacun se raconter sa petite histoire sur ce thème.
Ce titre ‘One desire’ parle des désirs de chacun. Pour certaines personnes ce désir est de conserver la santé, d’obtenir un travail, tandis que pour d’autres c’est simplement pouvoir s’acheter la dernière Porsche ou le dernier ordinateur. Nous avons tous des désirs qui nous font vivre, qui nous motivent, qui trainent et entrent dans notre quotidien.
Je parle également des relations amoureuses traitées sur ce titre ‘Your eyes can’t see’, tes yeux ne peuvent pas voir, pour la traduction en français, car j’aime bien cette métaphore. Dans son livre ‘Le Petit Prince’ Antoine de Saint-Exupéry a écrit, “l’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec le coeur”. C’est le thème de ce titre.
Dans mes textes, je parle de faits actuels, parfois il sont autobiographiques, parfois pas, c’est toujours de la philosophie avec beaucoup d’humour.
Alain AJ-Blues: Souvent les artistes disent que leur dernier album est le plus abouti. Alors, Eric, je laisse philosopher… (rires)
Mr Hardearly: (rires) Tu m’attendais au tournant, c’est bien de toi, cette question… je te reconnais! L’album le plus abouti…? Oui, parce que je pense qu’en tant qu’artiste, et je dirai dans la vie en général, lorsque l’on fait quelque chose, si on essaie de le refaire, c’est en mieux, bien sûr. Lorsque que l’on fait des albums, c’est pareil. Je me dis que ceci et cela, je l’ai déjà fait dans les albums précédents, et donc je ne vais pas le refaire. Je me dis que j’ai fait ce son guitare ou ce son de voix, et cela ne sonnait pas très bien, alors je vais essayer de faire mieux dans le prochain. Donc on ne cesse de s’améliorer, de ne pas reproduire ses erreurs, et le dernier album est logiquement le plus abouti.
Comme tu me le demandes, je vais donc philosopher… Je pense que dans la vie, faire une erreur une fois, ce n’est pas grave, faire une erreur deux fois, c’est un manque d’inattention, faire une erreur trois fois… c’est la connerie qu’il ne fallait pas faire.
Alain AJ-Blues: Pour ce nouvel album tu as encore travaillé sur des compositions, comme d’habitude bien sûr…
Mr Hardearly: Comme d’habitude. Je dirai que par album figurent deux reprises et 10 ou 12 titres qui sont des compositions personnelles. Ce n’est pas un secret concernant les deux reprises, alors je peux le dire, il y a une chanson de Deep Purple, comme dans le précédent album d’ailleurs, et également une chanson que j’aime beaucoup d’un artiste peut-être un peu moins connu nommé Junior Wells, chanson déjà reprise entre autres par Joe Louis Walker. Soit l’on fait des reprises pas connues, soit d’autres très connues, c’est une question d’opportunité et de moment.
Alain AJ-Blues: Cet album ‘Im a Bluesman’, j’ai eu ce privilège de l’écouter en avant première avant cette interview…
Mr Hardearly: Deux fois, Alain…? (rires)
Alain AJ-Blues: Tu plaisantes Eric, au moins une quinzaine de fois! C’est un p….. d’ album de Blues qui touche au plus sensible de cette musique, du Blues et du Blues-Rock pur jus, avec quelques riffs endiablés qui te laisse sur le cul. Je ne dis pas cela parce que tu es en face de moi, je ne le dis pas non plus parce que nous dégustons le contenu d’une bonne bouteille de Bourgueil, je le dis sincèrement, car cet album est sublime. Sur tous tes albums, la guitare est très en avant, c’est ce que tu recherches avant tout, je pense.
Mr Hardearly: Merci Alain! C’est avant tout ce que je sais faire, mettre en avant ce que je fais le mieux. J’essaie de toucher les gens. J’essaie de pouvoir partager ma passion, qui est devenue un métier avec le temps et avec le public. Je le dis à chaque concert, deux choses sont importantes pour moi: j’essaie de faire chaque album et chaque concert comme si c’était le dernier, et peut-être qu’un jour, fatalement, ce sera le dernier. Deuxièmement, à l’écoute de mes albums et pendant la durée du concert, si on a pu faire oublier aux gens leurs soucis et leurs problèmes, c’est que l’on a réussi notre mission.
Alain AJ-Blues: Toujours fidèle à tes habitudes, tu joues en formation trio.
Mr Hardearly: Oui! A un moment de notre parcours, nous avons essayé de jouer avec, dirai-je, un “grand orchestre”, avec en plus du trio, trois cuivres, deux choristes et un clavier. Un producteur nous a conseillé à juste titre de jouer plutôt en trio et de mettre la guitare en valeur, ce qui était l’élément phare du projet. Nous avons tendance à jouer le plus possible en trio, bien que parfois nous tournons avec un clavier. L’avantage du trio, c’est quand même de jouer sans filet, il y a de place pour les musiciens, sans la possibilité de se cacher derrière son instrument. Chaque note que les musiciens jouent est entendue et partagée avec le public. Je demande à mes musiciens d’être vraiment investis artistiquement dans chaque minute que nous passons ensemble, dans chaque note que nous jouons, c’est un partage en temps réel.
Alain AJ-Blues: Restons sur tes musiciens actuels, ceux qui jouent depuis quelques temps avec toi et sont présents sur l’album, peux-tu nous les présenter?
Mr Hardearly: A la batterie, Frédéric Rottier. Cela fait quelques décennies qu’il est dans le métier, c’est quelqu’un de très professionnel, avec une bonne assise rythmique, qui n’a pas à rougir des batteurs de blues de renommée nationale et européenne. J’ai cette chance de pouvoir tourner avec lui.
Depuis 3 ou 4 ans, Alain Gibert m’accompagne à la basse et aux choeurs, et avec qui j’ai fait plusieurs albums. Il apporte énormément avec ses basses dans l’esprit McCartney, c’est à dire très mélodique. Et de plus, Alain est un excellent choriste.
Je dirais qu’à nous trois, nous arrivons à ‘sonner’ comme un groupe de cinq personnes. Ce sont pour moi deux éléments très importants, car un guitariste/chanteur aussi bon soit-il, n’est rien sans de bons musiciens à ses côtés. Exceptés Michael Jackson, Quincy Jones ou Prince, qui pouvaient se vanter de faire le spectacle tout seul, je considère que dans un groupe, même si quelque part je suis en avant dans cette formation, tout seul je ne suis rien sans deux bons musiciens qui m’accompagnent, m’épaulent et me poussent à me surpasser à chaque concert et à chaque album.
Alain AJ-Blues: Parlons guitares maintenant, car je te sens impatient, lesquelles utilises-tu?
Mr Hardearly: Je suis vraiment un fan de Stratocaster. J’ouvre une parenthèse: j’ai un projet, car on me demande de plus en plus souvent de présenter les instruments et le matériel avec lesquels je joue. Je pense que cet été, encore une fois pour les 10 ans du groupe, donc exceptionnellement et contrairement à mes habitudes, je vais faire une petite vidéo pour présenter les guitares que j’utilise, et de plus j’en possède des nouvelles. Je suis très Stratocaster des années 70, car les plus anciennes sont très onéreuses et les plus récentes de moins bonne qualité. Je joue avec trois guitares: la première, une couleur bois, la ‘Stevie’, conçue en hommage à S.R. Vaughan, la deuxième ‘anniversary’ fabriquée pour les 25 ans de Fender, et la troisième, ma dernière acquisition, que j’ai achetée pour des ‘queues de cerises’, une strato de 1974 de couleur noire, nommée ‘Blackie’ en hommage à celle de Eric Clapton. Cette dernière a un son monstrueux, elle va m’accompagner à la rentrée pour la promotion de l’album. J’utilise des amplis Fender et Marshall, et pour les pédales, que des standards, un Delay Boss, un Tube Screamer Ibanez, une wah wah vox, enfin rien d’extraordinaire, car je pense que le son vient du musicien lui-même, et non pas du matériel sur lequel il joue.
Je vais te conter une anecdote… Dans les années 80, je crois, Van Halen faisait la première partie de Carlos Santana. C’était la grande mode de Van Halen et Santana a voulu essayer le matériel de ce dernier, car beaucoup disaient que Van Halen avait un son fabuleux, et en fait le son qui sortait, c’était du Santana. Donc le son ne venait du matériel de Van Halen, mais de la façon de jouer de Santana. Je veux dire sans prétention, j’ai la chance de jouer sur de vieilles guitares vintage et j’en suis très content, mais si je jouais sur une Stratocaster récente avec ampli récent, cela sonnerait pareil et le public ne ferait aucune différence. Ce qui est important, c’est le musicien.
Alain AJ-Blues: J’acquiesce et j’approuve tes dires. Heureusement on ne remplace pas l’humain car son rôle est prépondérant.
Mr Hardearly: C’est comme pour la photo, c’est bien d’avoir du bon matériel, mais je pense qu’un bon photographe avec un appareil basique fera de meilleurs clichés qu’un mauvais photographe avec un très bon appareil.
Alain AJ-Blues: Je ne vais pas te demander le nombre de concerts joués durant ces 10 années, car je suppose que tu ne tiens pas ce genre de compte, mais restons sur l’année dernière par exemple…
Mr Hardearly: Depuis quelques années, nous avons de la chance et je touche du bois pour que cela dure, de faire une soixantaine de concerts par an, essentiellement en France, une année sur deux en Angleterre, et quelques concerts en Belgique. Prochainement nous allons pouvoir franchir d’autres frontières européennes car nous avons la chance d’avoir un tourneur, Ze Music Tour, qui gère également des artistes de renommée comme Neal Black, Fred Chapellier et j’en passe… Je ne vais pas tous les citer.
Alain AJ-Blues: Tu joues dans de nombreux endroits, aussi bien petites salles que festivals.
Mr Hardearly: Effectivement, salles de concert, festivals et clubs, aussi, car je n’oublie pas d’où je viens. J’ai commencé à jouer dans des clubs à mes débuts, il y a une trentaine d’années. J’aime le contact avec le public, j’aime pouvoir jouer à 1 mètre 50 de la première table ou du premier fauteuil situé dans la salle, comme j’aime également jouer devant 1.000 personnes, gêné par les spots et sans réellement voir le public. Jouer devant 1.000 personnes n’est pas forcément le fait de passer une meilleure soirée, parfois 80 personnes suffisent, tout est une question d’ambiance et de moment.
Pour jouer, nous sommes ouverts à toutes les propositions décentes, nous ne faisons pas les cafés et les PMU bien sûr, mais effectivement des clubs, car il y en a beaucoup en France, des clubs de Blues de renommée internationale. Nous sommes très fiers de jouer dans ces endroits où des artistes européens et américains comme Van Wilks ou Ana Popovic et d’autres se produisent.
Alain AJ-Blues: J’ai envie de dire, et cela n’engage que moi, la France est devenue l’autre pays du Blues au fil des années car nous avons de nombreux artistes et groupes, ainsi que de nombreux festivals, petits ou grands, pour que vive le Blues dans l’hexagone. Quelle est ton opinion à ce sujet?
Mr Hardearly: J’adore Fred Chapellier, c’est un personnage adorable et bourré de talent. Effectivement, il y a plein de bons groupes de Blues en France, je ne vais pas les citer, de crainte d’en oublier, mais je dirai que heureusement de bons programmateurs leur donnent leur chance et ce droit d’exister. C’est très important, car sans endroits pour jouer et sans public un groupe n’existe pas. Malheureusement en France, les endroits, les artistes, les salariés, croulent sous les charges, et il est de plus en plus difficile d’équilibrer les budgets pour les salles de concert et les festivals. De plus, avec le plan Vigipirate, certaines grandes manifestations sont dans l’obligation d’avoir héliports et endroits clos la nuit, cela complique la bonne organisation d’un festival de blues ou de rock.
Alain AJ-Blues: Nous abordons le côté financier dans cette conversation. Je ne parlerai pas des retraités, le sujet serait déplacé, quoi que… (sourire), mais de toi. Tu es professionnel et tu vis de ta musique, n’est-ce pas?
Mr Hardearly: Oui, je suis professionnel. Les concerts et les albums vendus sont notre salaire. Nous dépendons uniquement de la scène Blues et des organisateurs de concert.
Alain AJ-Blues: Je vais faire appel à ta mémoire, mais on se souvient toujours des meilleurs moments comme des pires d’ailleurs, mais conjuguons ensemble le positif. As-tu une anecdote à nous conter ou un fait marquant, fort, vécu durant toutes ces années passées dans le monde de la musique?
Mr Hardearly: Alors fort, pas forcément dans le bon sens du terme, mais j’ai souvenir d’avoir joué sur un festival en 2003, lorsque sévissait la canicule et la grève des intermittents. Nous partagions l’affiche avec Z.Z. Top, Status Quo, les Commitments, Georgia Sattelites, tu vois que des débutants (rires). Ce festival pouvait accueillir 10.000 personnes et il n’y en avait à peine 2 à 3.000. Alors je dirai, j’ai eu la chance, allongé sur l’herbe en buvant une bière, de voir Status Quo devant moi, à 10 mètres. Il n’y avait que 500 personnes devant la scène, le genre de truc qui n’arrive jamais. C’est malheureux pour le groupe et le festival, car c’était presque un concert privé, ce fait m’a marqué. Je veux également citer de belles rencontres, une scène partagée avec Bernard Allison dans un tout petit club aux puces de Clignancourt. Des gens qui viennent te voir souvent, comme des anglais par exemple, et qui te disent, moi j’ai connu Peter Green, tu es encore jeune et j’adore ce que tu fais, et tu le fais bien. D’autres, des personnes de 60/70 ans qui écoutaient de la musique avant moi, te disent, j’ai vu Jimi Hendrix, les Beatles… Pour moi les plus beaux hommages sont ceux de personnes plutôt âgées et anonymes.
Alain AJ-Blues: Produire un album, aujourd’hui, n’est pas toujours chose aisée, le parcours pour aboutir est parfois difficile, car il faut des gens compétents autour de soi, je te laisse le soin de nous en parler.
Mr Hardearly: Avant tout, je veux remercier tous les professionnels qui nous suivent, des journalistes au sens large qui nous font des articles, jusqu’aux photographes. La promotion est très importante, le meilleur groupe du monde sans promotion n’existe pas. Je veux également remercier toutes les personnes qui nous programment dans les salles et les festivals, et bien sûr tout ce public de plus en plus nombreux qui nous suit depuis 10 ans. D’ailleurs sur le site officiel Mr Hardearly, nous allons bientôt atteindre les 600.000 visites. Je vous remercie tous d’être acteur pour que Mr Hardearly puisse exister. Je veux également remercier tous les musiciens qui ont eu la patience de travailler avec moi durant ces dix années et qui se sont investis artistiquement et humainement, car la musique c’est chronophage. Cet album, je le voulais beaucoup plus roots, nous avons exploré différents courants musicaux avec le Blues comme base. Je voulais revenir à des racines, cet album a failli s’appeler ‘My cradle’, mon berceau, mes racines, un des titres de l’opus, mais ‘I’m a Bluesman’ est un marqueur pour les dix ans du groupe. Nous avons mis toute notre sensibilité dans cet album, il est inspiré de notre vie courante, donc de celle du public car nous partageons tous ces moments ensemble.
Alain AJ-Blues: Pour en revenir aux racines du Blues, je ne te le cache pas, j’aime beaucoup le Blues proche de ses origines, tu vois le truc bien dépouillé joué en acoustique, guitare/harmo. Envisages-tu un jour, plus ou moins proche, de faire ce genre d’album?
Mr Hardearly: C’est dans les projets. Pour l’instant nous sommes toujours en ascension, en quête de nouveau public, de nouveaux endroits pour jouer. Ce n’est peut-être pas forcément le moment, mais effectivement, si j’arrive à trouver l’appui d’un producteur, j’aimerai bien faire un album acoustique avec une ou deux guitares et un harmoniciste, je dirais que tout reste ouvert. J’aimerais aussi faire un album uniquement de reprises, pourquoi pas de reprises acoustiques, c’est une idée, mais pour l’instant nous sommes dans la dynamique de promotion pour les 10 ans du groupe. Mais dans un futur plus ou moins proche, il n’est pas improbable que ce genre d’album acoustique puisse sortir si nous avons la possibilité de le faire.
Alain AJ-Blues: Ce n’est qu’un projet, je le comprends et il est inutile de se précipiter. Tu vas me dire que je pousse un peu loin le bouchon, mais je vais me permettre d’insister, quels artistes, quelles légendes du Blues aimerais tu reprendre?
Mr Hardearly: Pour moi cet album de reprises, ou acoustique, ce serait plutôt une rencontre de musiciens centrée avec ceux avec qui j’aimerais jouer, avec des intervenants à l’harmonica, à la guitare, au clavier, au chant. Une rencontre avec des artistes avec qui j’aimerais partager un moment. L’acoustique se prête bien à ce projet, car il n’y a pas de tricherie, contrairement à l’électrique où un musicien peut se cacher dans un ensemble déjà existant.
Alain AJ-Blues: Tu ne réponds pas vraiment à ma question. Je t’ai demandé quels artistes tu aimerais reprendre. Je peux t’aider (rires)… John Lee Hooker, Luther Allison, Muddy Waters, T-Bone Walker…?
Mr Hardearly: Je ne peux pas te répondre précisément, car il y en a tellement que j’aimerais reprendre. Les idées, ce n’est pas ce qui me manque. J’aimerais au moins reprendre une chanson des Beatles.
Alain AJ-Blues: J’aime bien les Beatles, mais pour moi ce n’est pas du Blues!
Mr Hardearly: Je t’explique. L’intérêt de reprendre une chanson des Beatles est de la réarranger autrement et d’en faire une version Blues. Tout comme je pourrais le faire avec un titre de Deep Purple, car cela fait partie de ma jeunesse, de Whitesnake également, avec ce merveilleux chanteur qu’est David Coverdale, et pourquoi pas des Rolling Stones, ou de Muddy Watters. Je vais également te citer Robert Johnson, mais avec des rythmes différents, pour ne pas reprendre du textuel, car je n’ai pas le niveau pour refaire du Robert Johnson dans le texte, donc en le modernisant à ma sauce. Un mélange de cultures pour amener quelque chose de vraiment différent, indéfinissable et non calculé à l’avance, excitant et surprenant, voilà ce que je souhaite. J’envisage également un choix judicieux d’artistes différents, pour que chacun puisse amener son karma personnel. Je te le répète, ce n’est qu’un projet, c’est prendre des risques et je les assume, mais je veux surprendre en faisant quelque chose d’inhabituel. Mais pour l’instant ce n’est pas le moment, priorité à la promotion du nouvel album, de nos dix ans de carrière et d’un autre projet, mais il est trop tôt pour en parler publiquement.
Alain AJ-Blues: Merci Eric. Conjuguons l’humour, je vais te poser une question un peu naïve, comment est-tu venu au Blues? Je voulais dire comment est-tu venu au monde?
Mr Hardearly: (éclats de rire) J’ai eu la chance d’écouter de la musique dès mon plus jeune âge. Dès 11 ans, de mémoire, les premiers vinyles achetés étaient Dynasty de Kiss, Répression de Trust et Back in Black d’AC/DC. J’ai toujours écouté des groupes qui, pour moi, même si c’était considéré comme du hard rock à l’époque, avaient des racines blues. Je me suis rendu compte 10 ans après que j’aimais le blues, mais j’ai toujours écouté des musiques et des groupes comme Dire Straits, Pink Floyd, Santana, où je ressentais le blues. Fin des années 80, dans ma période rock et hard rock, j’ai commencé à faire quelques concerts avec des groupes et j’ai même eu quelques articles dans la presse. Ensuite le hard rock n’étant plus à la mode, je me suis demandé ce que j’avais envie de faire. Donc j’ai tout arrêté, les cheveux longs et tout le reste, pourtant j’adorais cela, les gens me prenaient pour un rocker. Mais j’aimais le Blues et tous ces artistes, Hendrix, Winter, Vaughan, Gary Moore… et peut-être avec cette mélancolie naturelle ancrée en moi, le Blues m’a parlé, c’était ma vocation je pense. Je ne sais plus qui disait cela, mais je cite: “si tu fais une métier que tu aimes, tu ne travailleras jamais”, et en ce qui me concerne il avait raison. C’est comme lorsque l’on posait la question à John Lennon quand il était petit: “Qu’est ce que tu veux faire plus tard?” Il répondait à la prof, “moi, plus tard, je veux être heureux”. Elle lui disait “John, tu n’as pas compris la question”, et John lui répondit, “non vous n’avez pas compris la réponse!”. Quitte à bosser jusqu’ à 60 ou 70 ans, je veux faire la musique que j’aime. Souvent les gens me disent: vous vous éclatez dans ce que vous faites. Chaque concert est différent, on ne joue jamais de la même façon, on se s’ennuie pas. Je vais te confier, car c’est une de mes fiertés, je suis autodidacte, je n’ais jamais pris un cours de guitare, mais par le passé, j’ai donné beaucoup de cours à des élèves, donc je suis un vrai escroc de la guitare (rires)!
Alain AJ-Blues: Alors je vais demander à l’escroc de nous confier ses secrets lorsqu’il compose ses musiques et ses impressions lorsqu’il partage avec le public…
Mr Hardearly: A part quelques thèmes qui sont écrits, tous mes solos sont improvisés. Je ne joue jamais de la même manière, c’est un reflet instantané. Des soirs tu es super content, tu vas jouer super joyeux, le lendemain tu apprends le décès d’un pote, tu t’es engueulé avec ta copine ou ta bagnole est en panne, tu vas jouer vachement plus triste. La musique et le Blues en particulier, c’est un reflet de ta vie au quotidien. En Angleterre, nous jouons deux fois dans la journée, le midi et le soir. Parfois en France également, et les deux concerts sont complètement différents suivant le moment et l’ambiance. Certaines personnes me disent: cela fait 5 ou 6 fois que nous assistons à vos concerts et ce n’est jamais pareil, je découvre à chaque fois. C’est un vrai compliment.
Alain AJ-Blues: J’ai remarqué que tu avais beaucoup de dates, tu joues souvent, alors qu’actuellement ce n’est pas l’évidence dans ce monde de la musique, comment tu l’expliques?
Mr Hardearly: Je ne peux pas l’expliquer, je dirais que nous avons de la chance. Nous ne sommes pas le meilleur groupe français de Blues, il y a des Fred Chapellier, des Paul Personne, et je peux t’en citer beaucoup. J’ai envie de dire que nous touchons les gens, nous avons un contact humain et aimons échanger avec le public. Faire oublier aux gens l’endroit où ils sont, ici ou ailleurs, peu importe, c’est les emmener, car avec nous ils sont ailleurs et ils oublient les soucis du quotidien, c’est notre philosophie. Je l’ai déjà dit, à chaque concert je donne tout, chaque concert je joue comme si c’était le dernier, et j’en profite au maximum, car ce n’est que du bonheur.
Alain AJ-Blues: Je te remercie infiniment, Eric, pour ta disponibilité, ces instants précieux accordés pour cette interview. Je te souhaite tout le meilleur, tout le succès que mérite cet album “I’m a Bluesman” et à bientôt à la croisée des chemins du Blues, et que vive cette musique. Je te laisse le ou les mots de la fin pour clôturer cet échange. Nous te disons bye l’ami… On the road again.
Mr Hardearly: Merci à vous deux. Dans la vie, l’important n’est pas d’être riche financièrement, mais humainement.
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