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Mr. Hardearly
White urban blues
INTERVIEW |
Interview
MR. HARDEARLY
Pour moi le top c’est une vieille Strato !
C’est un mec cool, mais son blues rock puissant, ardent, mordant avec des éclats
de soul et de funk cachés dedans dégage une réelle énergie. Mr H. apprécie le
travail en studio mais s’éclate vraiment sur scène.
Blues Again: D’où viens-tu Mr. Hardearly?
Mr. Hardearly : Eh bien, je suis né à Paris à la fin des années soixante. Parisien pur jus, j’ai commencé
la guitare vers l’âge de 15 ans en écoutant AC/DC, Trust, Hendrix, Santana…Puis j’ai commencé à jouer
dans divers groupes de rock à la fin des années 80 au Gibus notamment.
Début 90, je forme mon premier groupe de blues et j’ai rapidement commencé à tourner dans les clubs
de la région parisienne. Après plusieurs changements de personnel et quelques albums, nous sommes
allés jouer notamment en Angleterre pour 2 minis tournées (97,98) du côté de Newcastle, puis quelques
festivals français [Montereau 2003 (avec ZZ Top et Status Quo), Blues en VO 2004 et 2007…] pour
finalement sortir un album en 2007 un peu plus orienté pop rock. Après quelques soucis avec le label de
l’époque, je décide de revenir à mes racines et voici donc Mr Hardearly. Parallèlement j’enseigne la guitare
depuis 25 ans.
Comment as-tu été accroché par le blues ?
Je crois que tout gamin déjà j’étais sensible à cette musique. J’ai toujours été attiré par des groupes qui
avaient des racines blues, que ce soit dans le rock, la pop ou le hard rock comme on disait à l’époque.
Pour moi Joe Satriani et Eric Johnson, contrairement à Steve Vai, possèdent une culture du blues et l’utilisent
afin de métisser leur musique plutôt rock. Et puis plus tard j’ai eu l’occasion de voir des groupes comme les
Blues Brothers sur scène, Gary Moore avec Albert King, des vidéos lives de Vaughan et là j’me suis dis
« c’est ça que je veux faire », comme beaucoup de jeunes à cette période.
Quelles ont été tes influences majeures ?
Beaucoup de guitaristes en fait. Robert Johnson, Hendrix et Stevie Ray Vaughan, of course. Mais
également Jeff Beck et Pat Metheny pour le génie qu’ils possèdent. Ils sont, pour moi, vraiment uniques
et irremplaçables. Johnny Winter pour l’énergie et David Gilmour pour le coté posé et mature de son jeu.
Mais j’en oublie plein : Gary Moore, Eric Johnson….. Voilà pour les guitaristes. Des chanteurs comme Ian
Gillan, David Coverdale, Paul Rodgers et Ronnie James Dio (rip) m’ont vraiment donné envie de chanter.
Je trouve qu’ils sont un peu comme des grands crus, ils se bonifient avec l’âge. Et puis tu vois on n’est
toujours pas loin du blues.
Y a-t-il d’autres styles que tu affectionnes ?
J’aime beaucoup de courants musicaux. C’est vrai que je n’accroche pas tellement sur les musiques
électroniques genre techno, house, David Guetta et consorts. Ça me fatigue rapidement, peut-être que
je deviens vieux (rires). En fait, j’écoute à peu près tous les styles de musique tant que c’est joué avec le
cœur et par de bons musiciens. J’aime l’expression de la sensibilité humaine dans le domaine artistique,
ce qui n’est pas toujours le cas de nos jours.
Quels musiciens entrent dans ton panthéon personnel ?
Sans hésiter, Jeff Beck, Pat Metheny, Hendrix et S.R.V. Voilà les
disques que j’emmènerais sur une île déserte. Avec peut-être les
premiers albums de Whitesnake plus quelques inconnus du genre
Frank Zappa (rires).
Tu as fait une belle tournée en Angleterre l’hiver dernier.
Comment s’est-elle montée et comment s’est-elle passée ?
Oui effectivement, on a eu la chance de pouvoir aller jouer au Royaume Uni pour une dizaine de dates en
octobre 2012 grâce à notre ami et chanteur Howard Baker qui enchaine plus de 300 dates par an là-bas.
On a reçu un accueil très chaleureux en tant que Bluesmen français de la part du public anglo-saxon et
cela a vraiment été flatteur pour nous d’aller défendre nos nouvelles compos à l’étranger. Bien sûr le
« typical english weather » ne nous a guère permis de quitter la chambre d’hôtel mais la chaleur humaine
a largement fait oublier le climat local. On espère y retourner prochainement. On doit d’ailleurs jouer sur
le prochain CD d’Howard Baker, cela nous ouvrira peut-être d’autres portes outre-Manche.
Ton nouveau CD White Urban Blues a une direction différente du précédent. Comment est-il né ?
Cet album, contrairement au précédent, a été enregistré live en studio. On n’a pas passé de temps à faire des
overdubs, on s’est plutôt concentrés sur l’énergie qui se dégageait de telle ou telle prise même s’il y avait
quelques imprécisions techniques. On a enregistré en formation réduite, voire parfois en trio. Les compos
sont plus matures que sur Still Alive & Well car nous avons pris le temps de les roder sur scène pendant un
an avant de les enregistrer, ce qui a considérablement modifié certains titres qui ne fonctionnaient pas en
live. Le son est énorme tout en gardant ce côté roots et vintage que j’affectionne particulièrement. Je
pense que finalement, on a élargi le spectre de nos influences pour ce CD en y incluant notamment de
la Soul et du Funk.
Une seule reprise, un titre de Joe Louis Walker. Pourquoi ce titre en particulier ?
Parce que c’est un titre que j’aurais aimé avoir écrit et composé. Je me sens vraiment proche de l’ambiance
de cette chanson. Mais il y en aurait tellement d’autres que j’aurais aimées reprendre de lui. J’adore J.LWalker,
son jeu de guitare instinctif et énergique, sa voix souvent haut perchée. Un artiste que je respecte au même titre
que Joe Bonamassa et Derek Truck entre autres. La relève du blues pour moi…… J’aimerais vraiment travailler
avec l’un d’entre eux un jour.
Sur White Urban Blues, tu fais un bel hommage à Gary Moore disparu début 2011. Tu le cites
dans tes références mais as-tu croisé son chemin ?
Merci, cela me touche que l’on apprécie ce titre. Comme je le dis dans la chanson, je l ai découvert en 1985
lors d’un concert et cela a été une révélation pour moi. C’est un peu grâce à lui (et à d’autres) que je suis
musicien et sur scène aujourd’hui. Il y a tellement d’émotion dans son jeu et dans sa voix, et cela aussi pendant
sa période « hard rock » des années 80. Si j’avais su jouer de la guitare, j’aurais aimé jouer comme Gary Moore.
Les médias l’ont beaucoup « descendu » lors de son premier virage blues alors que ces albums sont devenus des
classiques depuis. C’est quelqu’un qui me manque énormément encore aujourd’hui, comme SRV, George Harrison
ou Jon Lord. ‘Gary’s Gone’ est une chanson dans le style de Moore où je reprends trois de ses principaux thèmes,
comme un dernier hommage à son talent.
Par rapport à ton précédent CD paru fin 2009, tu as changé
le line up du groupe. Dans quelle optique ?
Elargir nos influences était le but premier. Le changement d’équipe c’est
fait aussi à cause de problèmes d’agendas des anciens musiciens. La nouvelle
section rythmique apporte un côté groove et funky qui sert à merveille les
nouvelles compos. J’essaie de faire évoluer ma musique constamment. Tu vois,
les treize titres de l’album ont déjà évolué depuis l’enregistrement car on les joue régulièrement sur scène et jamais
de la même manière exactement. La nouvelle équipe est vraiment très créative et l’on travaille déjà sur les compos
du prochain CD.
Présente les musiciens…
A la batterie Kevin Bédéjus qui joue avec nous depuis deux ans maintenant, Yves Moisy à la basse et aux chœurs et
Minh Pham aux claviers. On a fait beaucoup de concerts en trio avec Yves et Kevin et je t’assure qu’il y a une vraie
énergie qui se dégage sur scène.
Des projets en perspective ?
Dans l’immédiat on s’occupe à temps complet de la promotion de White Urban Blues. Beaucoup de concerts
dans la foulée et jusque dans le sud de la France si tout va bien. J’aimerais jouer notre musique à travers
l’Europe. Pour la suite on va continuer d’ébaucher le prochain opus et surtout jouer, jouer jouer ! J’aimerais
avoir aussi le temps et l’opportunité de travailler avec d’autres artistes que j’apprécie pour quelques
collaborations artistiques. Et puis peut-être reprendre un peu la guitare acoustique aussi…
Sur quel genre de guitare joues-tu ?
Ayant travaillé à une certaine époque pour quelques magazines de guitares (je faisais les bancs d’essai
de matériel), j ai pu tester moult guitares. Pour moi le top c’est une vieille strato. J’adore ma Strat sunburst
de 1966, elle est incroyable, elle finit par devenir le prolongement de moi-même. J’aime la versatilité du
son, le confort de jeu et la légèreté de l’instrument. La Les Paul est trop lourde et la forme du corps ne
convient pas à ma morphologie. La Telecaster : trop brut à mon goût et un poil agressive pour mon jeu
de guitare. Je suis vraiment un Fender addict. Mon ampli est de la même marque (rires) Pour la tournée
2013/2014 je vais utiliser ma Strat 66 bien sûr mais également une 71 bleue et 2 strat de 75 couleur bois.
J’ai aussi mon pedalboard, pièce indispensable pour le son de Mr H.
Quand et comment composes-tu en général ?
Question embarrassante. Je n ai pas de règle (je crois d’ailleurs qu’il n’y en a pas). Le jour, la nuit…Parfois
j’ai une mélodie qui me vient en tête, je la développe et j’essaie de coller quelques accords dessus. Une autre
fois je vais jammer sur un rythme de batterie et les accords s’enchaînant, la musique arrive toute seule. Et parfois
je passe des heures à essayer de trouver le bon arrangement pour tel titre, et là, rien à faire, rien ne vient. Mais en
général je compose à la guitare. Rarement au piano car je manque cruellement de technique. Et puis l’inspiration
dépend largement de l’humeur du jour. Il faut avoir des choses à dire, des sentiments à exprimer pour être créatif :
si je suis trop stressé, ou bien trop fatigué c’est compliqué pour moi, rien de bon ne sortira. Il faut trouver le juste
équilibre émotionnel et se sentir libre.
En dehors de ton activité scénique tu gères un studio d’enregistrement. Depuis combien de
temps et comment a débuté cette aventure ?
Le studio El GROTTO (elgrotto.free.fr) existe depuis 20 ans déjà. En fait j’ai toujours fait de l’enregistrement.
Depuis le début, dans les groupes dans lesquels je jouais, j étais le seul à avoir un 4 pistes à cassette et
des micros alors naturellement les musiciens me demandaient « tu peux nous faire une maquette pour démarcher ».
Voilà ça a commencé comme ça. Et puis de matériel en matériel, je me suis retrouvé avec un studio complet
où je pouvais réaliser mon rêve : ne faire que de la musique. Je l’ai conçu de sorte que l’on puisse proposer
aux artistes un maximum de services : cours de musique, écriture de texte, composition, arrangement, enregistrement,
mix & mastering, infographie (pochette, affiche, site web), dossier Sacem, vidéo (clip, concert)……
C’est ce que j’aurais aimé pouvoir trouver à mes débuts (et par la suite également). Un endroit convivial et
performant où les artistes viennent enregistrer et travailler avec plaisir.
Depuis que tu es dans la musique quel est ton meilleur souvenir… et quel est le pire ?
Le meilleur souvenir, c’est à chaque fois qu’on joue en concert et qu’on parvient à être en osmose et en harmonie
avec le public. La chaleur et les bonnes vibes qu’il nous envoie. Ça réchauffe les tripes et ça nous donne la niaque
pour avancer. Le pire souvenir n’est pas très vieux, c’était en juillet 2010, au festival Jazz à Vannes. J’ai réalisé mes
2 pires cauchemars : me coincer l’index de la main gauche dans la porte de la chambre d’hôtel la veille du concert
(merci la pharmacie de garde) et faire le show (gavé d’antidouleur) sur un Jazz Chorus Roland ! Aïe aïe aïe le son
mdr ! Vous pouvez d’ailleurs écouter le résultat sur notre site (www.hardearly.com ) sur la vidéo du concert…
Quels ont été tes derniers coups de cœur ?
J’ai fait une exception : j’aime le dernier Daft Punk (rires). Sinon Derek Trucks band, Manu Lanvin,
Thomas Dutronc et les premiers CD de Joe Bonamassa que je ne connaissais pas.
Et ton dernier coup de gueule ?
Savoir qu’il y a des gens à 500 mètres de chez toi qui bossent et qui malgré tout vivent sous le seuil de pauvreté et
que tu ne peux rien faire, à ton niveau, contre ça. Ça, ça me révolte. Je me sens forcément responsable mais pas
coupable, n’étant pas élu politique. Maintenant vu les guignols de droite comme de gauche qui se sont succédés au
gouvernement, je pense que les choses ne sont malheureusement pas prés de s’arranger.
Quel serait ton rêve le plus fou en tant que musicien ?
Arriver à jouer correctement de la guitare (rires). Avoir suffisamment de succès ou être suffisamment riche pour pouvoir
produire des artistes inconnus mais bourrés de talent afin de proposer une alternative à tout ce formatage médiatique.
Essayer de mettre un coup de pied dans la fourmilière. Ouais, faire du développement d’artistes ! Définitivement !
Quels sont tes hobbies en dehors de la musique ?
Le sport : footing, vélo, natation. Les bonnes bouffes entre amis, l’informatique (forcément !) et puis surtout quand
je ne travaille pas, rester en famille et m’occuper de mon fils qui a 7 ans maintenant.
Gilles Blampain – Blues Again – mai 2013
www.hardearly.com
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